L'art d'utiliser le Check-Raise
Une fois qu'un joueur commence à jouer au poker, le Check-Raise est généralement la première stratégie à laquelle il peut faire face mais également celle qu'il intègre dans son répertoire de techniques stratégiques. Il en est de même pour la technique du Check-Call bien que cette dernière soit plus passive. Le principal danger dans l'utilisation du Check-Raise réside dans le fait qu'une utilisation abusive ou mal placée peut mettre le joueur qui l'applique dans une situation où son Stack est mis en danger imminent. L'on peut se demander alors pourquoi utiliser le Check-Raise ? Les réponses sont : pour déstabiliser un adversaire et le décevoir grâce à la pression exercée par cette technique mais également dans une optique de coup défensif. À noter que l'efficacité du Check-Raise est surtout optimale en Limit Holdem car le degré de violence de ce coup est atténué dans la variante NL du Holdem. Le jeu sur Internet est également largement marqué par les Check-Raise allié au fait que la notion de Timing Tells.
Pour optimiser l'effet d'un Check-Raise, donner une bonne image de joueur TA - Tight–Agressive - sur la table est préconisée. De plus, la pratique du Check-Raise offensif envers la victime doit lui donner le sentiment étouffant d'être pris au piège sans lui donner la possibilité psychologique de se coucher.
Concernant l'art d'utiliser le Check-Raise, il existe une stratégie de défense très profitable en cash-game. Ce coup est nommé Check-Raise défensif. En effet, il arrivera que parfois, l'on se retrouve avec des mains marginales qui seront, toutefois, temporairement supérieures à celles des adversaires. « Temporairement » car une paire ne tient pas longtemps face à un tirage de Quinte Nuts. Le Check-Raise dans ce cas de figure, permet de faire coucher l'adversaire sans lui donner la possibilité de tirer à la Turn sa Quinte à petit prix. L'avantage du Check-Raise est d'ordre psychologique. De plus, l'utilisation du Check-Raise permet une récolte d'informations immédiates sur les mains des joueurs adverses. Une main check-raisée mais sur-relancée est une main sûre d'être battue. Une main check-raisée mais juste suivie démontre la faiblesse d'un adversaire qui paie pour voir un tirage sortir. Il est important de savoir que la stratégie ne peut s'avérer payante que si une étude des tells des adversaires a été établie. Sans ces informations, le risque est important. De ces quelques cas de figures, sont issus la stratégie Check-Raise défensif.
Néanmoins, le Check-Raise, de par la position de domination psychologique qu'il procure, est une pratique orientée également et essentiellement vers un jeu offensif. L'objectif dans ce cas de figure, est de rentabiliser les mains très fortes, voire les Premiums Hands de type AA – KK – AK – QQ – JJ – TT. En ce sens, la stratégie consiste à effectuer le Check-Raise en vue d'obtenir un gros pot. Le coup se joue en deux temps. Le Check met en place le piège pour embourber les adversaires, ensuite lorsque la carte suivante apparaît, la relance moyenne donne le coup de grâce. L'adversaire est engagé et ne lâchera plus sa main jusqu'au Showdown où il paiera son erreur de jugement par rapport à la Monster Premium en main que vous détenez. En attendant, le Check-Raise aura permis un grossissement optimal du pot.
Flop, turn ou river ?
Check raiser pour gagner plus ou faire passer les mains à tirage, d’accord. Mais à quel stade du coup ce move est-il le plus efficace ou le plus à propos ? Tout dépend de la configuration du coup.
Au flop. C’est à ce moment du coup que le check raise s’exécute le plus souvent de façon la plus profitable. Ce doit être le cas notamment dans un multiway pot, et dans les conditions que nous avons vues plus haut. Toujours très efficace à cette street, en particulier si le pot a déjà été relancé et donc déjà conséquent.
Au turn. Il y a trois cas où le check raise est plus profitable au turn : le premier, en heads up et si le pot est petit. Il vaut alors mieux miser le flop, et check raiser le turn, pour gonfler artificiellement le pot et accorder ainsi une marge de manœuvre réduite à votre adversaire pour compléter un éventuel tirage. En effet, il commet une plus grosse faute en payant un raise au turn à tirage qu’au flop, sa cote se trouvant réduite de plus de la moitié.
Seconde configuration où le check raise au turn est la meilleure solution : si vous êtes relancé au flop alors que vous avez misé avec un très gros jeu. La meilleure façon de le piéger est en effet de caller sagement sa relance et de checker le turn. Une fois qu’il aura misé (95% du temps), vous le relancez. Tous les ingrédients pour l’attraper sont là : pot grossi, cote détruite et adversaire déstabilisé !
À la river. Le moment où le check raise est le plus rare, car le plus complexe.
Tout simplement parce que rares sont les joueurs qui, à moins d’avoir un très gros jeu, vont miser la river. Peu de joueurs sont en effet assez techniques pour oser un value bet à la river. Or, si votre adversaire a un très gros jeu, il vous faut avoir le nuts ou presque pour vous permettre un check raise ! Trois configurations se dégagent alors pour un possible check raise à la river. Tous requièrent cependant des profondeurs de tapis de l’ordre de 100 BB pour être sereinement exécutables.
Le premier, en pur bluff. Contre un joueur capable de faire un continuation bet sur les trois streets, de bluffer la river sur un tirage raté, de miser la river avec une paire mais surtout capable de lâcher sa main. Bref, un bon joueur !
Le second, un peu risqué, s’exécute avec une over paire que l’on check/call au flop et au turn avant de raiser à la river. C’est une option dangereuse, à ne tenter donc que sur un flop/turn très inoffensifs, mais extrêmement rentable car le joueur, qui a eu toute l’initiative du coup, y est si engagé que vous pourrez dans certains cas lui soutirer tout son tapis. Ainsi, vous pouvez tenter ce move avec RR sur un flop Vt7k3p, et un 2c turn. Dans ce cas, il est probable que votre adversaire ait misé avec RV, DV ou même V10. Vous pouvez donc envisager assez sereinement cette option du check/call pour finir en check raise à la river. En revanche, si le turn est une carte du type 8k, qui ouvre de multiples tirages, et que vous n’êtes pas en heads up, à proscrire absolument !
Enfin, le troisième, parfaitement à l’opposé : le check raise à la river se fait avec le nuts au flop ! Un nuts difficile à battre, tel un full. Ainsi, si vous avez DD en main, et que le flop est D22. Checkez le flop, misez le turn, en particulier s’il ouvre des tirages, et check raisez la river si celle-ci complète un ou des tirages. Profitabilité garantie !
Vous l’aurez compris, le check raise permet en quelque sorte, et dans des situations bien précises, de se réapproprier le pouvoir sur un coup. Mais plus globalement, son usage fréquent, dans des configurations différentes, influe sur votre image : votre check ne s’apparente plus nécessairement à de la faiblesse et devient plus difficile à analyser, vous inspirez de la crainte à vos adversaires, et par conséquent obtiendrez des free cards plus souvent. Désormais, jouer les tirages hors de position ne relèvera plus pour vous de la gageure ou du casse-tête probabiliste.